Dhammavicaya sambojjhaṅga

Le mot dhamma renvoie aux caractéristiques individuelles des phénomènes physiques et mentaux. Le mot vicaya signifie dans ce contexte « investigation ». Dhammavicaya signifie donc investigation des caractéristiques des phénomènes physiques et mentaux. Les dhammas sont qualifiés de sabhava, soit « qui existent individuellement ». On expérimente les dhammas à travers leurs caractéristiques propres. Ainsi l’élément terre (paṭhavī) se manifeste par la dureté ou la douceur, l’eau (āpo), par la fluidité et la cohésion, le feu (tejo), par la chaleur et le froid et l’air (vāyo), par le support, la vibration, la tension ou le relâchement. La caractéristique ou la qualité de l’esprit est de connaître l’objet. Celle du ressenti (vedanā), de ressentir, de nous pousser à agir.

Lorsque nous observons l’abdomen, nous expérimentons la tension, les mouvements, les vibrations, les pressions, etc. Si nous ressentons de la chaleur par exemple, nous distinguons l’objet physique et la prise de conscience de cet objet, qui est mentale. Comprendre de cette façon, c’est développer dhammavicayasambojjhaṅga.

Chez le débutant, ce bojjhaṅga n’est pas très clair. Il le devient au stade de udayabbayañāṇa. Lorsque le méditant s’habitue à voir les caractéristiques individuelles des phénomènes, il commence aussi à distinguer leurs caractéristiques communes d’impermanence, de souffrance et de non-soi. Il voit que les objets disparaissent sitôt apparus et voit cela comme désagréable. Il comprend aussi que c’est incontrôlable. Ce sont les trois caractéristiques de anicca-, dukkha- et anattalakkhaṇa. Bientôt le méditant expérimentera la caractéristique de nibbāna: santilakkhaṇa ou le calme. Cette réalisation des caractéristiques individuelles et communes de nibbāna fait aussi partie de dhammavicaya. Nibbāna partage la caractéristique du non soi avec les autres phénomènes mais est en revanche permanent et agréable.

Tant qu’on ne commence pas à percevoir les caractéristiques des phénomènes, on est dans l’ignorance ou l’obscurité. Dhammavicaya est comme un phare qui éclaire les phénomènes et en révèle les caractéristiques. C’est sa fonction. On ne se demande plus s’il y a un individu qui contrôle ces phénomènes, ce qui les cause, s’ils sont plaisants ou déplaisants, si nibbāna existe, etc. Dhammavicaya se manifeste sous la forme d’une certitude absolue.

La cause proche de dhammavicaya par rapport à un phénomène, c’est la compréhension du phénomène qui le précède. Comme pour l’apprentissage d’un métier, la connaissance est progressive et c’est la compréhension d’un premier objet qui permet la compréhension du suivant.

Il y a sept conditions pour le développement de ce facteur: ❶ Demander des explications à ceux qui savent. ❷ Garder les bases internes (cheveux, ongles, etc.) et externes (vêtements, environnement, etc.) propres. ❸ Equilibrer les facultés: la foi (saddhā) doit être en équilibre avec la sagesse (paññā) et l’effort (viriya), en équilibre avec la concentration (samādhi). Une foi excessive rend crédule, une connaissance excessive rend méfiant et incapable d’accepter les remarques, un effort excessif empêche de se connecter à l’objet et une concentration excessive rend somnolent. ❹ Eviter les fous. ❺ Fréquenter les sages, non pas les érudits, mais les pratiquants qui ont atteint au moins le stade d’udayabbayañāṇa. ❻ Investiguer les dhamma profonds: agrégats, bases sensorielles, éléments, fondements de l’attention. ❼ Incliner constamment l’esprit vers le développement de la pratique et lui donner la priorité sur la connaissance intellectuelle.