Ariya sacca (suite)

Comment mettre l’enseignement en pratique, faire correspondre théorie et pratique ? Il y a trois types de sacca (vérité) : sammuti (conventionnelle), paramattha (ultime) et ariya (noble). Cette dernière est quadruple :

❶ dukkha sacca : la souffrance ne se limite pas aux ressentis désagréables. Cette souffrance est masquée dans la vie quotidienne par les concepts qui la couvrent. Il faut développer une forte attention et concentration pour la voir. Dans la vie quotidienne, les gens se complaisent dans les sensations agréables. En réalité, les trois types de ressentis (agréables, désagréables et neutres) sont dukkha, car ils sont impermanents, insatisfaisants et incontrôlables.

❷ samudaya sacca : Il est très difficile de comprendre les nobles vérités, car le Dhamma est profond. La vie, c’est lutter pour obtenir quelque chose, comme une maison par exemple, l’obtenir, souffrir de le perdre, ou vouloir autre chose, et ainsi de suite. C’est le saṃsāra. Le désir est la cause de la souffrance.

❸ nirodha sacca : la cessation de la souffrance, c’est nibbāna. Tous les jours, nous répétons notre souhait d’atteindre magga et phala. Il y en a quatre chaque fois : sotāpatti, sakadāgāmi, anāgāmi et arahatta magga et phala. Il s’agit de consciences susceptibles d’apparaître à tout moment quand les conditions sont présentes. Comme la conscience visuelle qui apparaît quand l’objet visuel et l’œil se rencontrent, ou le souvenir qui nous revient en raison de causes extérieures. Étymologiquement, nibbāna vient de ni (éloigné) + vāna (jungle, désir). La souffrance s’enracine toujours dans le désir.

La caractéristique de nibbāna, c’est santi lakkhaṇa, un état de paix et de calme, mais cette paix ne provient pas des sens. C’est difficile à comprendre car nous sommes persuadés que le bonheur dépend des sensations. C’est comme une personne qui émerge d’un sommeil profond (similaire à nibbāna) et se sent reposée, rassérénée et paisible (similaire à une sensation).

La fonction de nibbāna, c’est un objet qui ne disparaît pas, ne se dissout pas, même si les consciences qui le prennent pour objet, magga et phala citta, apparaissent et disparaissent. C’est impossible de comprendre vraiment ceci en théorie. Nous pouvons expérimenter nibbāna dans cette vie même. Un sotāpanna n’a plus de doute et s’est débarrassé des vues fausses.

❹ Magga sacca : pour expérimenter la fin de la souffrance, il faut pratiquer le noble octuple sentier, composé des trois branches de la moralité (parole, action et moyens d’existence justes – ici les yogis ne doivent pas se soucier de leurs moyens d’existence qui restent dès lors très purs), de la concentration (en retraite, nous déployons des efforts pour maintenir l’attention et faire naître la concentration quand l’esprit reste sur l’objet) et de la sagesse (la pensée et la compréhension justes qui mènent à nibbāna).

Ces quatre nobles vérités doivent devenir très claires pour les yogis même s’ils n’ont pas atteint nibbāna. Ainsi, ils auront confiance et accompliront ce travail que nul ne peut faire pour nous. Il faut pratiquer aussi dans la vie quotidienne. Vipassanā est un art de vivre.

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