Consciences réelles et illusoires & agrégats comme étrangers

Le pheṇapiṇḍūpama sutta compare les consciences (viññāṇa) à un tour de prestidigitateur. Si on ne pratique pas, on peut être dupés par celles-ci. On pensera : « je vois, j’entends, je sens quelqu’un, cette nourriture que je goûte a été préparée par untel, c’est moi qui touche ainsi, qui pense, etc. Du point de vue ultime, cette compréhension est tronquée.

Il nous faut examiner le processus des consciences (vīthi). La conscience visuelle par exemple ne connaît que l’objet ultime et véritable, mais la réflexion qui lui succède, amène les conceptions erronées et substitue la conscience fausse à la réalité. C’est le tour de magicien. Quatre vīthi ont lieu lorsque nous voyons. Le premier ne saisit que la réalité ultime, les trois suivants sont réflexifs et portent sur ce qui a été vu. La connaissance du second porte encore sur l’objet de la réalité ultime mais au troisième, les concepts de forme (ceci est un homme, une femme, etc.) apparaissent et au quatrième, les concepts de noms (c’est Mme B). Si on note rapidement « voir » au deuxième processus, les concepts erronés n’apparaissent pas et on reste branché sur ce qui a été expérimenté réellement. Il en va de même pour les autres sens.

Si le yogi s’entraîne bien, la prise de note est de plus en plus rapide et acérée, les processus de connaissance cessent immédiatement et, comme le disent les textes, dans le fait de voir, il n’y a que la vision. Un yogi devient capable de saisir la sensibilité de l’œil et la conscience visuelle. Le yogi ne croit plus que la vision, l’audition, la pensée, etc. perdurent un long moment et les voit disparaître à chaque fragment de seconde. Il n’y a que terreur et souffrance et rien ne suit le cours qu’il a voulu.

Les sept premiers aspects des agrégats du sīlavanta sutta relèvent de dukkha. Le huitième est leur caractère étranger (parato) : comme un homme sur qui nous n’avons pas autorité car sa loyauté va à un pays étranger. Cette caractéristique relève d’anatta, le trait le plus distinctif de l’enseignement du Buddha et aussi le plus mal compris. Au temps du Buddha, les gens croyaient en une forme ou l’autre d’atta : ① comme un maître du corps et du soi. Mais quiconque pratique quelques minutes se rend compte de cette impuissance en nous qui nous met à la merci de notre esprit. ② comme un résident permanent, qui entre dans le corps à la naissance et sort à la mort. Nous ne sommes pas nécessairement libres de ces vues. Certains bouddhistes pensent qu’atta quitte le corps par la bouche à la mort et va dans un autre corps, sans jamais devenir impermanent. ③ comme un agent qui accomplit tout ce que nous faisons. ④ comme un expérimentateur de nos joies et de nos peines. Le Buddha a rejeté ces vues dans son deuxième sermon. Le yogi ne trouve que deux choses pendant la méditation : l’objet et l’attention à celui-ci.

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