Grande compassion : la soif jamais étanchée

Les buddhā voient toutes sortes de souffrances parmi les êtres qui doivent constamment lutter pour assurer leurs moyens d’existence, qui n’ont pas de refuge car ils sont inéluctablement entraînés vers la vieillesse, la maladie et la mort, qui n’ont pas de possessions propres puisque tout devra un jour être abandonné et enfin, qui ne sont jamais entièrement comblés et satisfaits avec ce qu’ils ont et sont esclaves de l’avidité, taṇhā (Ūno loko atitto taṇhādāso).

Nous cherchons à acquérir des choses en croyant qu’elles nous combleront, mais une fois acquises, nous voulons souvent plus. Celui qui a 100 veut 200 et celui qui a 200 veut 300. Les riches veulent toujours plus et meurent sans être satisfaits. À l’instar de l’océan jamais comblé ou du feu qui redouble de vigueur quand on l’alimente, taṇhā n’est jamais étanchée. Les êtres deviennent esclaves de taṇhā. Ils sont comme des serviteurs laborieux et misérables car leur maître, mauvais, leur ordonne d’accomplir toutes sortes de tâches jusqu’à leur mort. Des êtres non libérés peuvent aller jusqu’au meurtre en obéissant à leur maître. Ajatasattu a ainsi commis l’un des cinq pires crimes (tuer son père, sa mère, un Buddha, blesser un Buddha ou causer un schisme) en tuant son père et poussé par le désir de régner. Il dut renaître en enfer.

Les puthujjana ont encore beaucoup d’avidité, les sotāpanna l’ont éliminée à 25%. Ils sont libres des formes les plus grossières mais sont encore victimes de kāmataṇhā. Les sakadāgāmi l’ont éliminée à 50%, les anāgāmi, à 75%, ils n’ont plus kāmataṇhā mais bien rūpataṇhā et arūpataṇhā, ne subissent plus de souffrance physique et mentale en raison de taṇhā mais subissent encore saṅkhāradukkha. Les arhats sont entièrement libérés de taṇhā.

Lorsqu’il atteint la libération, comme un prisonnier qui sort de prison, le Buddha exprima sa joie par ces vers :

anekajātisaṃsāraṃ, sandhāvissaṃ anibbisaṃ.
gahakāraṃ gavesanto, dukkhā jāti punappunaṃ.
gahakāraka diṭṭhosi, puna gehaṃ na kāhasi.
sabbā te phāsukā bhaggā, gahakūṭaṃ visaṅkhataṃ.
visaṅkhāragataṃ cittaṃ, taṇhānaṃ khayamajjhagā.

Il compare la vie et les agrégats à une maison dont il a cherché en vain le constructeur (taṇhā) pendant quatre périodes incalculables et 100.000 ères cosmiques, les naissances répétées lui causant une grande souffrance. Désormais le constructeur est vu et ses poutres (les autres pollutions mentales) sont brisées. Le faîte du toit (l’ignorance) est brisé.

Taṇhā est le moteur, l’origine de la souffrance. Les puthujjana sont les plus pitoyables. Nous devons développer karuṇā à l’instar du Buddha, en visualisant les êtres de tous l’univers qui subissent toutes sortes de misères, sont lassés de chercher à acquérir ce qu’ils désirent et que d’autres misères attendent encore lorsqu’ils devront vieillir, tomber malades et mourir. Nous devons pratiquant l’attention parallèlement à karuṇā : « puissent tous les êtres de ce pays / du monde entier / de l’univers entier / de tous les univers sans limites être libres de la misère ».

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