Grande compassion : les sept flèches

Nous avons vu la grande compassion des buddhā concernant les quatre expositions (dhammuddesa). Les buddhā ont par ailleurs conçu une grande compassion pour les êtres percés de flèches, piégés, emportés par le courant et brûlés par un feu incandescent. Seuls les buddhā peuvent ôter ces flèches ou pieux (salla), qui représentent les actions déméritoires du passé. Il y a sept flèches qui percent la poitrine des êtres et s’enfoncent jusqu’à la colonne vertébrale : ❶ rāga. Les puthujjana sont contents d’en être percés. Dans le plan sensuel, les êtres nourrissent et encouragent kāmarāga. Mais pour les arhats l’irruption de rāga est comme une flèche qui les perce. ❷ dosa. L’aspect perçant de cette flèche est plus évident : le visage se rembrunit, devient affreux, l’esprit est agité et intolérant. La personne se satisfait toutefois de sa colère et reproche à ceux qui veulent intercéder de prendre le parti de l’adversaire. ❸ moha. Ceux qui en sont percés considèrent ce qui est impermanent comme permanent, pouvant apporter le plaisir et possédant une substance propre. Moha vient dans le sillage de rāga et dosa. ❹ māna, l’orgueil, réduit aussi les êtres à la misère. ❺ diṭṭhi nous amène à nous attacher à de fausses croyances qui deviennent indéracinables et induisent la commission d’actes néfastes. ❻ vicikicchā. Le doute sur la réalité du Buddha, du Dhamma et du Sangha et sur la renaissance heureuse ou misérable en fonction des actes commis. ❼ duccarita. Ces mauvaises conduites (tuer, voler, mentir, etc.) deviennent inévitables pour les êtres percés des autres flèches.

Voir les trois caractéristiques des phénomènes n’est pas possible sans concentration, la concentration est impossible sans l’attention (la conscience pleine de l’objet) et l’attention à son tour ne peut s’obtenir sans l’effort. Ces trois facteurs sont les plus essentiels pour la pratique.

Les yogis observent le corps et l’esprit aux six portes des sens. Si leur attention est continue, l’esprit qui note prend le dessus sur les empêchements (désir sensuel, malveillance, paresse, torpeur, agitation, remord et doute). Cette purification de l’esprit est appelée cittavisuddhi. L’esprit pur permet de voir qui ce qui contemple et ce qui est contemplé sont distincts, à chaque observation. Il n’y a rien hormis l’objet et la conscience de celui-ci.  En poursuivant l’observation, le yogi voit les causes et les effets. C’est le désir de marcher, pencher, etc. qui amène ces mouvements. C’est l’apparition de la sensation qui conditionne la conscience de celle-ci. Chaque réalisation écarte un peu la flèche de diṭṭhi. Nous percevons clairement l’objet depuis son apparition jusqu’à sa disparition et observons qu’il est impermanent, souffrance et non-soi. La confiance en le Buddha grandit et vicikicchā est écarté dans la mesure de nos réalisations. L’atteinte d’ariya maggañāṇa fait cesser nāmarūpa et toutes les misères. Nous éliminons complètement les vues fausses, surtout celle du soi et de la personnalité (atta et sakkāya diṭṭhi). Nous ne doutons plus de la pratique. C’est donc la pratique qui permet de se débarrasser de la flèche de vicikicchā.

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