La suffisance et ses effets kammiques

Subha posa donc quatorze questions au Buddha par rapport aux causes des inégalités entre humains. La sixième paire de questions concernait les personnes de bonne ou mauvaise naissance. Les gens très orgueilleux qui méprisent les autres renaissent dans les quatre états de misère et, s’ils renaissent comme humains, renaissent dans des circonstances malheureuses. Les personnes humbles à l’inverse renaissent dans les cieux ou, si elles renaissent comme humains, sont bien nées.

Poṭṭhila était un moine érudit connaissant par cœur le Tipiṭaka, dont les nombreux élèves étaient tous arhats, mais qui ne s’intéressait pas à la pratique. Un jour, le Buddha l’appela Poṭṭhila l’inutile (tucchapoṭṭhila), ce qui le piqua au vif. Le Buddha ne prononce jamais que des paroles vraies et bénéfiques. Poṭṭhila se rendit auprès de trente arhats et demanda à l’aîné de l’instruire pour la méditation. Pensant que Poṭṭhila serait vaniteux, l’aîné le renvoya au second, lequel le renvoya au troisième moine en ancienneté, et ainsi de suite jusqu’à ce que Poṭṭhila soit renvoyé à un novice arhat de sept ans. Il lui demanda humblement un sujet de méditation. Le novice consentit à condition que Poṭṭhila suive ses instructions sans ciller. Il dit : « supposez une butte à six trous dans laquelle se cache un lézard. Pour l’attraper, il faut boucher cinq orifices et monter la garde au sixième ». De la même façon, il ne faut pas laisser le processus de conscience au niveau de l’œil, de l’oreille, etc. se développer jusqu’au stade de l’impulsion (javana), mais l’interrompre au stade de la décision (voṭṭhabbana). Dans le processus mental qui s’enclenche ensuite à la porte de l’esprit, il faut développer des vipassanā javana qui encouragent à capter le phénomène véritable de nāmarūpa qui apparaît et disparaît constamment, sans penser au passé ou au futur. Poṭṭhila devînt arhat. « La sagesse procède de vipassanā, sans vipassanā la sagesse est perdue, connaissant ces deux chemins menant l’un au progrès, l’autre au déclin, il faut développer la sagesse » a déclaré le Buddha à cette occasion (Dhammapada 282).

‘diṭṭhe diṭṭhamattaṃ bhavissati, sute sutamattaṃ bhavissati, etc.’ (Dans le vu, l’entendu, etc., il ne faut voir que le vu, l’entendu, etc.) C’est difficile, mais pas impossible. Lorsque l’on voit, dans l’immédiateté, l’objet visible, la conscience visuelle, le contact, ou la sensation qui en procède, la vision disparaît aussitôt. Il en va de même de l’audition : l’onde sonore disparaît de façon continue, elle n’est ni plaisante, ni personnelle. C’est difficile d’observer ainsi car nous sommes habitués à porter des jugements chaque fois que nous entendons, à introduire de nombreux concepts (paññatti) dans ces processus. L’audition est un processus complexe. Lorsqu’un son familier nous parvient, nous traitons de nombreuses données et déterminons en une fraction de seconde sa provenance, sa nature, la distance, la direction, etc. Ces mêmes séries de processus mentaux se produisent pendant la pratique, mais nous essayons de capter la réalité ultime (paramattha).

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