Les jhāna

Le but de la pratique est de parvenir à la compréhension du Dhamma à travers celle des trois caractéristiques des phénomènes et ainsi de mettre un terme à la souffrance et sortir du saṃsāra (ñāyassa adhigamāya nibbānassa sacchikiriyāya). Je me concentre généralement sur le développement des connaissances intuitives et parle donc peu des jhāna. Jhāna signifie fixité de l’esprit ou absorption. La méditation samatha permet d’obtenir les jhāna en développant la concentration sur l’un des 40 sujets présentés dans les écritures (le plus souvent le va et vient de l’air au niveau des narines mais aussi les couleurs, la terre, l’eau, etc.). Mais la méditation vipassanā permet aussi d’obtenir les jhāna et d’atteindre en même temps l’illumination en comprenant la nature du corps et de l’esprit. Les jhāna seront expérimentés spontanément par celui qui pratique les quatre satipaṭṭhāna.

Il y a cinq facteurs constitutifs du premier jhāna : ❶ vitakka, c’est la pensée qui s’applique à l’objet de méditation. ❷ vicāra, c’est la pensée soutenue, qui frotte à l’objet. Comme une tasse sale qui doit être frottée longtemps, il faut noter le plus longtemps possible et sans interruption sans quoi les pensées s’infiltrent et les pollutions mentales (kilesā) dans leur sillage. ❸ pīti, quand les kilesā sont écartés, le méditant se sent confiant et joyeux. Cette joie n’est pas ordinaire ou sensuelle. À l’inverse de samatha, beaucoup d’objets sont observés dans vipassanā, tous les objets aux six portes des sens, mais le méditant capable de les noter tous se sent à l’aise, léger et sans fatigue. Mais cela demande un puissant effort. ❹ sukha, le bonheur et le confort. ❺ ekaggatā, la fixité de l’esprit qui adhère à l’objet.

Pour se débarrasser des kilesā, il ne faut pas que l’observation soit superficielle. Tant qu’il y a du désir dans l’esprit, il n’est pas possible d’atteindre les jhāna, tant le désir pour les objets matériels (œil, forme, oreille, son, etc.) (vatthukāma) que le désir pour les sensations (kilesakāma) qui ressortit de lobha ou de l’attachement. Si on note tout de suite l’objet, le désir ne peut pénétrer. Il faut se libérer de la tendance à désirer.

En atteignant le second jhāna, il n’est plus nécessaire d’appliquer l’esprit à l’objet, cela se fait naturellement.

Le pratiquant vipassanā ne vise pas les jhāna, mais en notant chaque objet qui apparaît, il atteint aussi la fixité de l’esprit, même s’il passe d’un objet à l’autre, car l’attention est continue. Dans le cadre de samatha, on parle d’upacāra samādhi (concentration d’accès proche du jhāna) et d’appanā samādhi (absorption dans l’objet). Dans le cadre de vipassanā, lorsque l’on voit les objets apparaître et disparaître, la concentration est aussi très puissante et semblable à l’absorption. La concentration momentanée (khaṇika samādhi) décrit ce type de concentration où l’esprit se maintient sur chaque phénomène noté.

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