Les matérialités sont impersonnelles

Dans le sutta, le Buddha demande aux cinq bhikkhū s’il est juste de s’attacher aux cinq agrégats par désir, orgueil ou vues fausses. Comment se débarrasser des trois types d’attachement ?

Toutes les formes de matérialité, passée, présente, future, interne, externe, grossière, subtile, inférieure, supérieure, proche ou lointaine doivent être considérées justement comme « ceci n’est pas à moi », « je ne suis pas ceci », « ceci n’est pas mon ego ». Il y a onze façons d’observer les matérialités, mais les matérialités passées, présentes et futures couvrent la matérialité sous toutes ses formes. Il n’est pas possible de comprendre les événements passés, sauf par inférence. La réalité ultime n’est observable que dans le présent. Le reste, ce sont des concepts.

Au plus on est concentré, au plus on voit distinctement, on distingue le mouvement et la conscience du mouvement. On réalise que la sensation de pression au soulèvement ne se prolonge pas jusqu’à l’abaissement, que les matérialités présentes dans le pas droit ne parviennent pas jusqu’au pas gauche. Il en va de même lorsque l’on penche ou que l’on s’étire. Les phénomènes disparaissent instantanément.  Plus tard, dans un seul mouvement, on percevra une succession de dissolutions. On en déduit que toutes les formes de matérialité, passées ou futures, sont impermanentes, qu’elles sont souffrance et impersonnelles, car elles apparaissent en vertu de causes. Mais il ne faut pas réciter « ceci n’est pas à moi », il faut observer.

Dans le jhāna sutta, Sāriputta demanda à Channa s’il percevait le corps comme sa possession, etc. Voir que le corps apparaît et disparaît constamment, qu’il n’est pas désirable ou contrôlable revient à voir « ceci n’est pas à moi », etc. L’orgueil vient de la croyance en la permanence, Mais il faut pour cela noter les phénomènes aux six portes sensorielles. Si on ne pratique pas ou si on pratique mal, on ne pourra saisir les phénomènes au moment de leur apparition et on pensera que la matérialité présente au moment d’entendre est la même que celle du moment où nous voyons, que c’est la même personne qui voit, entend, touche, goûte et pense. Le Visuddhimagga précise : les propriétés matérielles du passé ont cessé d’exister et n’atteignent pas le présent. Comme elles sont impermanentes, elles sont souffrance, ne sont pas contrôlables, et donc insubstantielles.

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