Les méditations protectrices: aspect répugnant du corps et attention à la mort

La troisième méditation protectrice, asubhabhāvanā, consiste en l’observation des parties du corps: cheveux, poils, ongles, dents, peau, etc. On énumère 32 parties. Comme pour une voiture qu’on reconnaît comme telle une fois assemblée, quand toutes les parties du corps sont réunies, on pense voir un homme ou une femme. Mais si on considère chaque partie séparément, le corps perd son attrait et on ne trouve rien pour s’attacher. Un cheveu pris individuellement n’est pas beau et ne sent pas bon. Il est répugnant s’il tombe dans la nourriture. Si on considère le lieu où s’enracinent les cheveux ou les dents, ils deviennent repoussants. Idem pour les rognures d’ongles. Le corps n’est attrayant que si on le prend dans son ensemble.

Les jeunes entichés du corps n’aiment pas cette pratique. Elle est pourtant très bénéfique pour la pratique de vipassanā. Elle rend notre esprit beau. Le Buddha donne la priorité à la purification de l’esprit. Si nous voyons les corps comme beaux, les facteurs mentaux du désir et de la convoitise (rāgā) se renforcent. La pratique d’asubhabhāvanā nous en affranchit au contraire. Par habitude, nous ne verrons plus dans une personne séduisante que des parties. L’exercice consiste donc à observer ces parties en nous-mêmes.

La quatrième méditation protectrice, maraṇasati, est pratiquée pour développer le sens de l’urgence spirituelle (saṃvega). Le but n’est pas de paniquer le pratiquant mais de lui inspirer une saine peur. En comprenant que la mort peut survenir à tout moment, nous ne serons plus effrayés le jour venu. Comme les vagabonds qui retirent des ordures ce qu’elles contiennent de précieux, nous voudrons, avant de mourir, extraire de ce corps son essence: sīla, samādhi et paññā. Face à l’inconfort dans la méditation, nous serons plus patients, ce qui nous permettra d’approfondir enfin la concentration. Certains craignent que les douleurs les rendent malades. Mais celui qui contemple la mort parvient à endurer ces douleurs, il réalise le chemin et le fruit et, finalement, nibbāna, l’état sans mort. Contempler la possibilité de renaître en enfer, comme animal ou comme esprit affamé peut aussi stimuler notre effort. On peut aussi penser aux efforts à consentir pour gagner sa vie et mener une vie décente, avec un minimum de confort. Certains sacrifient leur santé pour y parvenir et, s’ils reprennent naissance, devront le faire à nouveau. L’atteinte du chemin et du fruit pourtant peut nous assurer le confort jusqu’à la fin de notre existence dans le saṃsāra. Maraṇasati devrait être pratiqué quotidiennement, en retraite ou en dehors de celle-ci.

Les quatre méditations protectrices (ārakkhabhāvanā) devraient être pratiquées chacune pendant une minute environ chaque jour avant une méditation assise.