Les onze feux et la joie empathique (muditā)

Onze feux brûlent les êtres, trois pollutions mentales (kilesā) : l’avidité (rāga), la colère (dosa) et l’ignorance (moha) et huit misères du saṃsāra : ❶ jāti. Venir à l’existence est une souffrance et les autres misères rencontrées au cours de l’existence découlent de la naissance, quel que soit le plan d’existence, y compris ceux des devā et des brahmā. Ce feu est le résultat des kilesā et des kamma accumulés dans les vies antérieures. ❷ Jarā. Dans chaque type d’existence, nous vieillissons, les cheveux grisonnent, la vue et l’ouïe baissent, le système immunitaire faiblit. ❸ maraṇa. La mort, inévitable. ❹ soka : le chagrin et l’anxiété. ❺ parideva : les lamentations pour la perte des propriétés, l’échec professionnel, etc. ❻ dukkha & ❼ domanassa : la souffrance physique et mentale. ❽ upāyāsa : le désespoir.

Voyant cette souffrance, le Buddha a conçu une grande compassion pour tous les êtres brûlés par onze feux à la fois. Il réalisa que personne hormis lui-même ne pouvait extraire les êtres de cette souffrance en donnant les bonnes instructions.

Muditā, c’est la joie empathique. Nous nous réjouissons de voir les autres heureux et prospères. La plupart des gens sont plutôt habités par issā, l’envie, qui est l’opposé de muditā. Ils n’aiment pas les succès des autres, leur large compagnie, leur belle apparence, leur bonne éducation, leurs promotions et souhaitent leur malheur. En développant muditā, nous devenons capables de développer un sentiment de joie en voyant les autres prospérer. Cette pratique permet une profonde purification de l’esprit. Il faut d’abord la développer à l’intention d’amis intimes qui sourient constamment ou de proches : puissent-ils ne pas subir de perte et continuer à jouir de leur bonheur et conserver l’intégralité de leurs biens. Les yogis récitent ainsi chaque jour ‘Yathāladdhasampattito mā vigacchantu’ Il y a douze catégories : sattā, pāṇā, bhūtā, puggalā, attabhāvapariyāpannā, itthiyo, purisā, ariyā, anariyā, devā, manussā, vinipātikā. Si on spécifie la direction (disa odhisa muditā), cela fait 12 catégories multipliées par dix directions soit 120 façons de rayonner muditā. En ajoutant à cela les douze façons de réciter muditā sans spécifier la direction, on arrive à 132.

 Issā est un facteur nuisible susceptible de nous entraîner en enfer s’il nous inspire des actes ou des paroles néfastes. Si nous reprenons vie comme humain, nous n’aurons personne pour nous aider. Le commentaire raconte l’histoire d’un homme dont les bras furent coupés et qui ne trouva personne pour lui donner un peu d’eau. Ceux qui développent muditā à l’inverse renaîtront dans les plans célestes ou s’ils renaissent comme humains, bénéficieront de beaucoup d’aide. Cette pratique permet donc d’acquérir des mérites sans rien faire. Il faudrait pratiquer muditā et vipassanā parallèlement.

Pour synthétiser, nous souhaitons que tous les êtres soient libres du danger, de la souffrance physique et mentale et capables de porter le fardeau des agrégats (mettā), qu’ils soient libres de la misère qu’ils endurent maintenant (karuṇā) et qu’ils soient capables de conserver les richesses et le bonheur acquis (muditā).

Page précédente