Les trois types de ressentis

Il y a trois types de ressentis (vedanā) : agréables (sukha), désagréables (dukkha) et neutres (upekkhā ou adukkhamasukha). Il n’est pas possible de les expérimenter avec samatha. Sans les comprendre, nous ne pouvons comprendre l’enseignement du Buddha, profond, subtil et visible seulement avec l’œil de la sagesse. En pratiquant avec ardeur, nous y parviendrons, la confiance se manifestera et nous aurons un surcroît d’énergie. Nous ne voudrons plus manquer une seule annotation. C’est le bénéfice de vipassanā.

Nous sommes des puthujjana qui vivent dans le monde des plaisirs des sens (kāmabhava). Nous aimons voir, entendre, sentir, goûter, toucher et penser. Beaucoup ne s’intéressent absolument pas à la méditation qui interdit de regarder ou de parler, oblige à ralentir et à contrôler les sens.

Les trois types de ressentis peuvent être chaque fois associés ou dissociés des plaisirs sensuels (sāmisa et nirāmisa). Se réjouir de sa famille, de ses biens ou de sa maison par exemple ressortit des ressentis mondains agréables, les disputes, les pertes, l’association à ce que l’on n’aime pas, la séparation de ce que l’on aime, la non-obtention de ce que l’on désire relèvent des ressentis désagréables mondains. Ne pas être trop intéressé par ce qui se passe ressortit des ressentis neutres mondains. Nous ne comprenons pas que ces ressentis apparaissent et disparaissent constamment. Nous aimons même cette succession d’impressions. Le pratiquant vipassanā doit observer l’impermanence, la souffrance et l’insubstantialité de ces ressentis. Si les douleurs deviennent très fortes, nous verrons la colère, l’insatisfaction, voire le découragement si nos efforts ne paient pas. Il s’agit de ressentis désagréables physiques et mentaux non connectés aux sens. Si cependant nous parvenons à noter avec précision, à nous absorber dans l’objet et à percer la douleur ; la joie et la confiance se manifestent, il s’agit de ressentis agréables non sensuels.

Nous notons au début ‘soulèvement’, ‘abaissement’, mais n’adhérons pas à l’objet et ne le pénétrons pas, et des pensées, souvenirs, critiques ou projets pénètrent l’esprit. Puis, lorsque nous voyons tous les objets apparaître et disparaître, voyons toutes les petites phases des mouvements, nous sommes excessivement enthousiastes. L’esprit est alerte et intéressé par la pratique. Il y a énormément d’objets à noter. Nous disposons désormais d’un adaptateur (yoniso manasikāra) qui permet d’être patient par rapport à la nourriture, au climat, etc., de nous adapter à tout. C’est l’une des quatre conditions pour atteindre l’illumination, avec l’association aux personnes vertueuses, l’écoute des enseignements et l’objectif d’atteindre magga, phala et nibbāna.

Si nous sommes capables d’expérimenter les ressentis neutres, cela signifie que nous sommes parvenus à développer ces qualités dans une certaine mesure, à noter tous les objets apparaissant et disparaissant, pendant la marche, etc. Nous savons qu’un seul moment d’inattention permettra aux impuretés de pénétrer l’esprit. Les ressentis désagréables ne nous feront plus peur et les agréables ne nous agiterons plus. Nous emmenons partout l’adaptateur avec nous. Nous n’aurons plus besoin des encouragements du professeur. C’est comme gravir le mont Kyaiktiyo en Birmanie, ceux qui en redescendent encouragent ceux qui montent.

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