L’impermanence des cinq agrégats & la matérialité

Sāriputta explique donc qu’un bhikkhu vertueux doit observer les 5 agrégats comme impermanents, insatisfaisants, insubstantiels, etc. Qu’est-ce que l’impermanence ? Selon le Visuddhimagga, sa caractéristique est de passer par les trois stades de l’existence : apparition, changement ou vieillissement et disparition. Le yogi déduit ces caractéristiques de son observation. Lorsqu’il atteint le stade d’udayabbayañāṇa, il voit les nouveaux agrégats comme s’ils entraient par la fenêtre. Cette connaissance doit venir de notre propre expérience, par la pratique de vipassanā et non des livres ou du prof. Il nous faut prouver pour nous-mêmes cette impermanence, y compris celle de l’esprit, comme lorsque nous notons par exemple : « vagabonder, planifier ou juger ». Ainsi, nous ne serons plus dépendants de la foi, c’est l’une des caractéristiques du Dhamma (sandiṭṭhiko)

Le commentaire définit la caractéristique de l’impermanence comme la non-existence après avoir été. S’asseoir, se lever, marcher, voir, sentir, etc., il nous faut vérifier si ces objets disparaissent. Il est important néanmoins de voir la disparition. Voir l’apparition seulement pourrait nous amener à la conclusion inverse.

Troisième question du commentaire : que signifie observation répétée de l’impermanence (aniccānupassanā) ? Il faut l’observer moment après moment (khaṇa anicca), l’observation casuelle, comme lorsque l’on constate la mort de quelqu’un par exemple, ne suffit pas car ne mène pas au désenchantement ou au détachement. Une fois que l’on quitte la pratique, anicca n’est plus qu’un souvenir.

On dit que l’impermanence et la souffrance peuvent être enseignées hors de l’ère d’enseignement d’un Buddha, mais pas le non-soi. Pourtant, le Buddha lui-même affirme que qui voit l’une des trois caractéristiques voit automatiquement les deux autres.

Dans le Pheṇapiṇḍūpama sutta, le premier agrégat est comparé à un amas d’écume comme on en voit sur les cours d’eau. Une observation négligente les prendra comme substantiels, comme le corps qui est vu comme beau, bon, permanent si on l’observe superficiellement mais comme le mélange abominable de 32 parties telles que cheveux, poils, ongles, urine, etc. si on l’observe attentivement. Une analyse plus fine encore ne percevra plus qu’un amas de particules subatomiques comme des grains de sable. En réalité, le corps est dénué d’essence interne, de noyau permanent ou d’entité vivante. Si en en retire l’élément d’extension (pathavī dhātu) qui se manifeste par la dureté ou la douceur lors du toucher, l’élément de chaleur ou de froid et l’élément du mouvement ou de la raideur (vāyo dhātu), et que l’on retire aussi l’odeur, on ne peut plus l’identifier. Comment, lors de la pratique, réduire, écraser ces éléments pour en voir la nature réelle. En réalité, le nouveau écrase l’ancien. Il faut observer avec attention, casser, briser le corps et le voir disparaître. Décomposer la marche, l’assise. Lorsque l’on est concentré, on peut noter le désir d’aller, de bouger, etc. Lorsque l’on est plus concentré encore, on peut briser le corps plus profondément et voir que toutes les apparitions sont très brèves. À ce stade, on ne reconnaît plus le corps, les processus physiques disparaissent constamment.

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