Objet primaire et autres objets

Il faudrait se conformer aux instructions du Buddha dans la pratique des quatre satipaṭṭhāna. Il faut déployer une énergie (ātāpa) physique, en maintenant le dos droit à l’assise et à la marche, et mentale en notant précisément chaque objet qui se manifeste dans le corps et l’esprit sans omission. Les instructions sont faciles à comprendre mais l’application est difficile.

Mahasi instruit d’observer l’abdomen comme objet primaire, comme point d’ancrage de l’esprit. Mais l’attention au corps (kāyānupassanā) ne se limite pas à cet objet. Il faut aussi observer minutieusement toutes les activités physiques au cours de la journée comme les changements de posture. Il est important de rester immobile pour développer la concentration et il faut développer la patience face aux désagréments. C’est difficile car nous n’y sommes pas habitués. Si la douleur est trop intense, nous devons bouger attentivement, en observant précisément et respectueusement.

En résumé, vipassanā, c’est noter tout ce qui entre par les six portes sensorielles de façon à comprendre sa nature impermanente, insatisfaisante et impersonnelle. Il n’est pas possible au début de noter tous les objets. Il n’est même pas facile de maintenir l’esprit sur l’objet primaire. L’esprit s’éparpille. Mais si on s’y efforce, l’attention peut se développer rapidement. En notant ‘soulèvement’ et ‘abaissement’, nous remarquons que le mouvement est tantôt rapide, tantôt abrupt, etc. Au plus nous observons, au plus nous voyons en détail tous les changements. A terme nous verrons aussi le caractère insatisfaisant des phénomènes et le non-soi.

L’objet primaire peut s’observer au niveau du nez (ānāpānasati) ou de l’abdomen, ce qui est plus facile. Le samathayānika se limite à l’objet primaire, mais le vipassanāyānika observe d’emblée tous les contacts sensoriels. Lorsque j’étais jeune, les maîtres nous instruisaient d’observer trois jours l’air au niveau des narines et d’observer ensuite seulement l’impermanence dans tout le corps. Il ne faut pas se limiter à ces objets et il faut observer les six types d’air dans tout le corps. Nous y parviendrons si nous apprenons à respirer de façon complète. Nous verrons l’air au niveau des poumons, mais aussi de l’abdomen et deviendrons très intéressés par la pratique.

Les instructions de Mahasi s’enracinent dans les écritures qu’il a étudiées à fond. Quand j’étais jeune, les gens croyaient en Birmanie que la méditation était pour les moines, les nonnes et les vieillards. Le premier ministre U Nu demanda à Mahasi d’ouvrir un centre de méditation à Yangon. Aujourd’hui, la méditation est très populaire en Birmanie.

Il faut que l’attention soit continue (satimā). Tant que les pensées, souvenirs, projets, analyses, etc. sont nombreux, l’attention n’est pas très développée. Il faut développer le désir de pratiquer (chanda), mais il ne faut rien attendre. Dès que l’esprit sera stabilisé sur l’objet grâce à l’effort (ātāpa), la claire compréhension va émerger naturellement (sampajañña). L’un des attributs du Dhamma est sandiṭṭhika, à réaliser par soi-même.

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