Perceptions et ressentis sont impersonnels

Il y a trois types de ressentis : plaisants, déplaisants et neutres. Le yogi doit tous les observer attentivement, afin d’en comprendre la nature réelle. Les notions de permanence, de bonheur et d’ego n’apparaissent plus à leur égard au sage. La sensation désagréable est comparée à une épine qui s’est enfoncée dans la chair, l’agréable à une grande souffrance en raison des efforts à déployer pour l’acquérir et à la détresse qu’amène leur perte, la neutre aussi demande des efforts pour être conservée. Dans l’anattalakkhaṇa sutta, les bhikkhū répondent au Buddha qu’il est incorrect de considérer les ressentis comme « ceci est à moi, je suis ceci, ceci est mon Ego ». Le yogi devra aussi se demander s’il est juste de penser « ceci est à moi » et d’y prendre plaisir, « je suis cette sensation » et de s’enorgueillir, « ceci est mon Ego » et de s’illusionner. Ce sont les caractéristiques d’impermanence et de souffrance qui rendent le non-soi évident.

Le Buddha demanda ensuite aux 5 bhikkhū si la perception était permanente ou impermanente. Celle-ci est de six types : la reconnaissance et le souvenir d’objets vus, de sons, d’odeurs, de saveurs, de touchers et de pensées. Dans la vie, cette mémoire photographique est très utile. Il est bon d’étudier et de mémoriser, notamment l’enseignement du Dhamma. Au plus la perception est claire, au mieux on se souvient. Mais la perception est erronément prise pour quelque chose qui perdure, quelque chose d’agréable et constitutif d’un Ego. On ne peut dire « puissé-je ne percevoir que des choses positives ». Lorsque des choses tristes ou dégoûtantes nous reviennent en mémoire, l’aspect négatif de la mémoire devient évident. Certains sont hantés par la disparition d’êtres chers ou leurs déboires financiers. Toutes sortes de souvenirs négatifs peuvent toujours refaire surface et nous plonger dans la détresse, ce qui peut même résulter dans la mort. Seule la disparition de ces souvenirs amène la libération de cette souffrance. On peut aussi souffrir en anticipant des scénarios catastrophe.

La perception est impersonnelle car elle dépend de conditions pour son apparition, pourtant les gens pensent : « c’est moi qui ai stocké ce souvenir dans ma mémoire et qui m’en souviens maintenant. » C’est parce qu’ils n’ont pas observé correctement au moment de voir, d’entendre, etc. Le yogi voit qu’il s’agit d’un phénomène naturel qui apparaît et disparaît sans cesse. Ce qui est entendu et reconnu l’instant précédent est différent de ce qui est entendu et reconnu maintenant.

Voyant les mots du Buddha disparaître à peine perçus, les bhikkhū répondirent au Buddha que les perceptions n’étaient pas permanentes, satisfaisantes ou personnelles. Si on les trouve plaisantes, on dira « ceci est à moi », si on est fiers d’avoir une bonne mémoire, on dira « je suis cela », chaque fois que l’on voit ou l’on entend, on pensera erronément « ceci est mon ego ». Les yogis doivent se poser les mêmes questions au cours de leur pratique.

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