Au cours de la pratique, les yogis sont confrontés à une triple résistance : la douleur physique, la douleur mentale qui vient en réaction et la résistance mentale au contrôle de l’esprit. L’esprit est tendu, il se sent menacé par le maintien de l’attention sur l’objet primaire. Cette tension se répercute sur le corps et nous fait perdre patience. Nous ne parvenons plus à observer la sensation douloureuse.
❽ C’est alors qu’il faut développer la huitième cause de renforcement des facultés de contrôle (indriya) : la patience et la persévérance. En cessant d’observer, nous laissons la porte ouverte à la colère et à l’avidité, lesquelles vont à leur tour rendre l’esprit confus et empêcher de voir clairement la douleur. Nous voudrons peut-être changer de posture, ce qui causera de l’agitation, car le calme de l’esprit procède du calme du corps. Nous perdrons l’occasion de comprendre la nature de la douleur.
En fait, la douleur nous est familière depuis toujours. En dehors de la méditation, nous la tolérons beaucoup plus facilement. Nous pouvons par exemple rester des heures sur internet si nous sommes absorbés par ce que nous voyons. Au plus l’esprit est concentré, au plus il pénètre et comprend la réalité. Sans concentration, nous ne voyons pas l’inconfort présent dans le corps à tout moment. La concentration nous rend conscients du moindre désagrément qui est comme magnifié par une loupe. Le monde autrefois indistinct et flou devient clair comme une goutte d’eau au microscope : la douleur fluctue et danse, elle n’est plus statique et devient intéressante. La concentration se renforce encore et parfois, la douleur peut disparaître subitement comme un rideau qui tombe.
Trois stratégies existent face aux douleurs : ① Diriger l’attention au cœur de la douleur, ne pas rester en surface et ne pas réagir. Cette stratégie peut s’avérer épuisante ② Si nous sommes fatigués, nous pouvons jouer avec la sensation, alterner des phases d’observation intense et puis laisser l’esprit récupérer de l’énergie ③ Si nous restons tendus malgré tout, ignorer complètement la douleur et observer l’objet primaire de façon très rapprochée, pour ne pas laisser l’esprit glisser vers les douleurs.
Nous devons surmonter la peur que nous inspire la douleur par un effort héroïque. Il est normal en méditation que toutes sortes de douleurs insupportables apparaissent. Des douleurs chroniques ou d’anciennes maladies peuvent refaire surface, nous offrant une chance de nous en débarrasser. U Pandita raconte comment un yogi se guérit d’une tumeur à l’estomac. La douleur était devenue insupportable mais il persévéra. Parfois il l’emportait sur la douleur, parfois il battait en retraite. Un jour, il ne restait que la douleur et la conscience de celle-ci. La boule dure dans l’estomac finit par exploser et disparut complètement. Quinze ans plus tard, il est toujours en bonne santé. D’autres maladies réputées incurables comme des maux de tête, des troubles cardiaques, etc. ont été guéris grâce à la méditation.