Rūpa comparé à quatre serpents mortels

La matérialité (rūpa), ce sont les parties sensibles de l’œil (rétine), de l’oreille (tympan), du nez, de la langue, la base du cœur (hadaya vatthu), etc. Sans cette sensibilité, nous ne pourrions penser qu’il y a un moi, comme nous ne le pensons pas pour une statue en bois ou un cadavre. Un atta est aussi erronément prêté aux autres éléments matériels qui se produisent simultanément : sons, visions, odeurs, etc. et le corps entier est concomitamment considéré comme une entité vivante.

Du point de vue conventionnel c’est vrai, mais du point de vue ultime il ne s’agit que d’agrégats matériels. Si la matérialité était le soi ou le noyau interne, il ne mènerait pas à la détresse et nous pourrions choisir de posséder une matérialité optimale. Elle ne causerait pas les cheveux gris, la perte des dents, le voûtement du dos, la surdité, la malvoyance, les rides et la mort. Nous ne souffririons pas de rages de dents, de flatulences, de la chaleur, du froid, de la faim, de la soif, de bactéries et de virus. En raison d’actes mauvais, certains doivent subir une naissance dans un mauvais corps. Bref, la fonction de la matérialité est de nous infliger toutes sortes de maux.

Le commentaire compare les quatre éléments à quatre serpents venimeux : lorsque nous sommes mordus par le serpent kaṭṭhamukha, l’élément terre est brisé, le corps entier devient raide et dur, comme des patients à l’hôpital qui souffrent du foie et meurent. Si nous sommes mordus par le serpent pūtimukha, l’élément eau est dérangé, le corps pourrit et des problèmes de prostate apparaissent. Si le serpent aggimukha (feu) nous mord, nous souffrons de fièvre, le corps entier est chaud et des cellules cancéreuses se multiplient. Le serpent satthamukha (air) enfin nous rend incapables de bouger comme après une attaque cérébrale. Le corps entier est comme coupé et cassé.

Rūpa exige en outre des soins constants. Les personnes jeunes sont peut-être en bonne santé, mais elles ne peuvent rester longtemps dans une même posture.

Les tenants de la théorie du soi distinguent deux types d’atta : ❶ jīva atta : âme individuelle créée par Dieu dont certains pensent qu’elle est un segment du grand atta. ❷ parama atta : Brahmā qui a créé le monde entier et ses créatures et qui selon certains emplit l’univers entier et selon d’autres réside aux cieux. Un jour, le Buddha rendit visite à Bakabrahmā et critiqua son ignorance car il pensait son royaume éternel. Un serviteur lui demanda alors de ne pas réfuter Bakabrahmā, chef des Brahmā et conquérant, qui a créé le monde et contrôle toutes les créatures, assignant à chacune son statut dans le monde.

En méditant, nous verrons la nature impermanente et incontrôlable des matérialités qui apparaissent en vertu de causes.

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