Contrôler le processus de vision

Je vais poursuivre aujourd’hui mon exposé au sujet de dama, le contrôle des sens par l’attention. Lorsque l’esprit est concentré, nous notons les nimitta, les images qui apparaissent, qu’elles soient plaisantes ou déplaisantes. Nous sommes conscients de quatre choses séparément: la sensibilité de l’œil, l’objet visuel, la conscience visuelle et l’esprit qui note.

cakkhuñca paṭicca rūpe ca uppajjati cakkhuviññāṇaṃ, tiṇṇaṃ saṅgati phasso.

Avec l’œil (cakkhu) et la forme visuelle (rūpa) apparaît (uppajjati) la conscience visuelle (cakkhuviññāṇa). La conscience visuelle permet de savoir par exemple si l’objet visuel est une femme ou un homme, etc. Lorsque tous les trois (taya) sont présents, le contact (phassa) se produit. Les trois doivent être nécessairement présents. Sans objet visuel par exemple, la vision n’est pas possible. Le contact cause à son tour le ressenti (phassapaccayā vedanā). Si l’objet est plaisant, le ressenti sera plaisant. S’il est déplaisant, le ressenti sera déplaisant, comme la peur ou le dégoût par exemple. Le ressenti cause à son tour le désir ou nous amène à vouloir quelque chose (vedanāpaccayā taṇhā). Parfois le désir est si fort qu’il devient attachement (taṇhāpaccayā upādānaṁ): on veut s’emparer de l’objet, le saisir et le tenir fermement.

Si on s’arrête au stade du ressenti plaisant, aucune conscience malsaine (akusalacitta) n’est générée, mais au stade de taṇhā ou lobha, une racine malsaine accompagne la conscience, laquelle causera de la souffrance. Si l’objet est déplaisant, c’est dosa, l’aversion, qui sera généré, ce qui causera aussi de la souffrance. Dans les écritures, il est dit: appiyehi sampayogo dukkho, piyehi vippayogo dukkho: l’association à ce qui est déplaisant est souffrance, la séparation de ce qui est plaisant est souffrance. Si on veut éliminer la souffrance, il faut observer attentivement. Si la conscience est contaminée par le désir, on ne peut voir les choses clairement telles qu’elles sont, c’est-à-dire impermanentes, insatisfaisantes et impersonnelles.

L’esprit qui note apparaît puis disparaît, un autre esprit qui note lui succède, et ainsi de suite. L’objet visuel aussi apparaît et disparaît. Même les objets subtils et fins sont vus. L’esprit qui note est clair et accompagné des racines de l’absence de désir, de haine et d’ignorance (alobha, adosa et amoha), il est pur. Comme il est dit dans le mahāsatipaṭṭhāna sutta, cette pratique amène la purification des êtres (sattānaṃ visuddhiyā). Le yogi énergique note de façon continue pour commer à l’objet. L’esprit ne va nulle part, il est brillant. Selon le Buddha, la nature de l’esprit est lumineuse, mais celui-ci est obscurci par les pollutions mentales. L’esprit pur permet de comprendre nāma (la conscience visuelle, l’esprit qui note) et rūpa (l’œil, l’objet visuel) et de les distinguer. Il ne s’agit pas d’une connaissance superficielle. On ne peut y parvenir avec une pratique superficielle.

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