Le bonheur de la pratique

Nous poursuivons l’explication à propos des quatre fondements de l’attention: au corps, aux ressentis, aux consciences et aux dhammas, en commençant par une stance du Dhammapada:

Evaṃ visesato ñatvā, appamādamhi paṇḍitā;
appamāde pamodanti, ariyānaṃ gocare ratā
Les sages dans la non-négligence, ayant ainsi compris distinctement;
se réjouissent dans celle-ci, heureux dans le domaine des êtres nobles.

Les yogis pratiquent conformément aux quatre satipaṭṭhāna: kāya-, vedanā-, citta- et dhammānupassana. Au début, ils ne sont pas capables de noter tous les objets aux six portes des sens mais ils poursuivent leur pratique ardemment. À la marche, ils font une, deux ou trois notes par pas. Ils construisent leur attention. C’est sammā vāyāma, l’effort physique et mental. Après un certain temps, ils deviennent capables de noter le soulèvement et l’abaissement de l’abdomen ainsi que les autres objets qui apparaissent. La confiance se développe alors. Ils ne veulent plus manquer le moindre objet. Ils ont le pouvoir de noter l’objet immédiatement. Cela les réjouit et ils prennent plaisir à la pratique.

Si l’esprit n’est pas stable sur l’objet, il est éparpillé (uddhacca). Le yogi ne connaît pas la nature de l’objet, du corps et de l’esprit. Il n’y a pas de réjouissance. Pire, la paresse et l’ennui apparaissent. La stance ci-dessus fait référence au domaine (gocara) des êtres nobles. Le centre de méditation est en quelque sorte le domaine du yogi où il est en sécurité, mais la stance fait spécifiquement référence aux quatre établissements de l’attention. La troisième claire compréhension aussi est appelée gocara sapajañña. Lorsque le yogi s’y maintient, le quatrième sampajañña, asammoha sampajañña, apparaît automatiquement. Il est synonyme de sagesse: le yogi comprend la nature de l’objet.

Il faut noter l’objet du début à la fin. Si la note n’est pas active, l’esprit peut facilement s’envoler à la fin du moouvement. Le yogi se détermine à noter du début à la fin et s’entraîne en ce sens. Les objets secondaires apparaissent alors aussi clairement: chaleur, froid, etc. Il distingue bien ce qui ressortit du corps et ce qui ressortit de l’esprit.

L’abdomen se soulève parce que l’air le pénètre. Ensuite, il se dégonfle. Le yogi comprend l’élément « air » (vayo dhātu). C’est parce qu’il observe qu’il acquiert cette compréhension. L’esprit qui note, c’est l’esprit, l’air, c’est le corps. Si son attention s’affine, il peut prendre conscience d’une forme de dureté ou de douceur vers la fin du mouvement vers le haut ou vers le bas. Au début, il ressent le mouvement et voit en même temps une sorte de forme. Lorsque l’attention est bien établie, il ne voit plus la forme et ne voit plus que le mouvement. Certains yogis le rapportent à l’entretien. Ils sont déçus et pensenr que leur pratique s’est dégradée. Le professeur doit bien les observer: ils gardent les yeux vers le bas et ne regardent nulle part. En fait, ils ont progressé.

Appamāde pamodanti: les yogis se réjouissent de leur pratique et sont contents d’être seuls. Le yogi qui voit clairement l’esprit et la matière élimine le concept. Il sait que la pensée « ceci est à moi » est erronée. Le comportement du yogi change. Il ne note plus seulement le soulèvement et l’abaissement mais peut voir tous les objets qui apparaissent aux six portes des sens. Il va plus lentement, s’assied lentement, etc. Il devient naturellement très précautioneux car l’attention l’habite. C’est le bénéfice de vipassanā, mais cela prend du temps.

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