Les cinq confusions

Au cours de cette retraite, nous avons cherché à comprendre la vie. Nous avons vu que les phénomènes physiques et mentaux ne cessent d’apparaître jusqu’à notre mort, et pourtant il est très difficile de les comprendre. Le Buddha a évoqué cinq choses difficiles à comprendre (sammoha) :

❶ kamma : Le kamma, ce sont les actions physiques, verbales et mentales. Les hindous et certains bouddhistes comprennent erronément les résultats du kamma comme le bien et le mal dont notre atta hérite. Le kamma ne peut être compris en profondeur qu’en expérimentant les causes et les effets dans la méditation. Mais même au niveau conceptuel, c’est difficile à comprendre. Certains sont heureux mais n’ont aucun mérite et vice versa. Seul celui qui possède l’œil divin peut voir les causes du bonheur ou du malheur des êtres. Chaque processus de conscience compte sept moments d’impulsion. Le premier entraînera des conséquences pour cette vie et le dernier pour la vie prochaine. Les autres constitueront un potentiel kammique jusqu’à la fin du saṃsāra. Notre détermination à faire le bien dépend donc de notre foi dans le triple joyau. Si tous possédaient la vue juste du kamma (kammassakatadiṭṭhi) nul n’accomplirait le mal et la paix régnerait dans le monde.

❷ dhamma : Nous pensons erronément avoir un corps solide qui nous appartient (sakkāyadiṭṭhi). Vipassanā permet de voir qu’il n’y a en nous qu’un assemblage de parties. Si nous expérimentons la chaleur ou la tension, nous ne parvenons pas à les localiser, car il s’agit d’éléments distincts. Cette confusion sera éliminée progressivement par les connaissances successives vipassanā.

❸ lakkhaṇa : Nous pensons que la tête est chaude par exemple, mais en réalité cette caractéristique existe en soi, indépendamment de la tête (Sabhāva lakkhaṇa). Si nous comprenons sabhāva lakkhaṇa, nous pouvons comprendre samañña lakkhaṇa, les caractéristiques communes d’impermanence, de souffrance (nous aimerions que ça dure mais ce n’est pas possible) et de non-soi (les choses fonctionnent indépendamment, de façon automatique). Au plus nous comprendrons, au plus la vie sera agréable.

❹ paccaya : Cette ignorance des causes est aussi très difficile à éradiquer. Ignorant que les choses apparaissent en vertu de causes, nous les désirons et agissons pour l’obtenir (sankhāra). Nous obtenons ainsi la vie, nāmarūpa, et le cercle vicieux du saṃsāra. Le désir est insatiable selon le Buddha, sauf pour le pratiquant vipassanā. Du temps du Buddha, un homme riche offrit à son vieil ouvrier autant de terres qu’il voulait. Mais le vieil homme devait toutefois délimiter en courant la surface qu’il voulait recevoir. Il s’épuisa et mourut d’un infarctus.

❺ nibbanā : Cette confusion-là est éradiquée au moment de la réalisation de nibbāna. Le yogi doit garder cet objectif constamment en vue, comme lorsqu’il récite : idam me sīlaṃ maggaphalañāṇassa…Il suffit de savoir que nibbāna représente une grande paix. Nous serons mûrs pour l’atteindre quand la sagesse sera très forte et profonde. Le puthujjana ne comprend pas encore bien mais la confiance et la sagesse vont se développer en pratiquant.

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