Les douleurs

Il est impossible d’ignorer les sensations en méditation. Dans le Mahāsatipaṭṭhāna sutta le Buddha instruit d’être conscients des trois types de ressentis : agréables, désagréables ou neutres, lorsque nous les expérimentons.

Le yogi qui doit rester immobile et droit pour développer la concentration commencera par ressentir les sensations désagréables : des raideurs, etc. En réalité, ces mêmes sensations surviennent dans la vie quotidienne, mais comme nous ne sommes pas attentifs à ce moment-là, nous changeons de posture et elles passent inaperçues. Ici, de la fatigue se manifeste au niveau du dos, des douleurs dans les jambes et toutes sortes de ressentis désagréables sont inévitables.

Il nous faut focaliser notre attention sur elles. Elles risquent alors de s’intensifier. Il est inutile et vain de chercher à les faire disparaître. Elles suscitent en nous la peur car nous n’avons pas l’habitude de les observer, mais il nous faut les accepter et les noter. Mahasi sayadaw recommande la patience.

Au début les douleurs seront intenses. Au plus nous observons, au plus nous les expérimenterons. Parfois elles se transformeront en chaleur, seront coupantes ou perçantes. Il faut les noter telles quelles. Elles vont peut-être diminuer ou disparaître. Il faut alors revenir à l’abdomen. Si elles réapparaissent ailleurs, il faut à nouveau les noter. Si nous sommes très attentifs, peut-être les verrons-nous se déplacer. Mais cela demande une forte énergie mentale et de la détermination.

Tôt ou tard, nous verrons la sensation à l’état pur. Nous ne verrons plus la forme du genou par exemple, mais seulement la douleur, alors qu’au début nous voyions les deux simultanément. Le méditant expérimenté comprend que la douleur n’est pas permanente, qu’elle fluctue. Le non-pratiquant ne voit que la forme extérieure quand il a mal. Mais il faut un certain temps pour parvenir à l’observer à l’état pur, car l’esprit ne veut pas l’observer.

Si nous tenons une heure sans bouger, les douleurs seront encore là mais la confiance va se renforcer. Il n’est pas interdit de bouger si les douleurs deviennent insupportables mais il faut l’éviter autant que possible et si on le fait, noter d’abord l’intention de bouger et puis observer très attentivement le changement de posture. On peut aussi concentrer l’esprit sur un autre objet, comme l’abdomen, ce qui atténuera les douleurs. Il est bon aussi de relever progressivement le seuil de tolérance à la douleur, restant immobile d’abord 20 minutes, puis 25, etc.

Aux sensations grossières désagréables (pressions, brûlures, coupures, etc.) succèdent bientôt des sensations subtiles désagréables, comme des douleurs autour de la bouche ou du nez, ou des démangeaisons parfois insupportables. À terme, le yogi expérimentera le changement constant de la sensation douloureuse, verra son impermanence et commencera à s’y intéresser, car elle lui permet de renforcer son esprit et d’observer avec fermeté. Les sensations deviennent agréables. Ce sont toujours les mêmes, mais l’expérience est différente. Une sensation de pression désagréable peut se transformer en mouvement. L’esprit qui note aussi change. Un tel yogi voit clairement, expérimente. C’est la sagesse.

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