Les trois types de ressentis sensuels et non sensuels

Le yogi ressentira d’abord inévitablement les sensations désagréables. Il devra se montrer patient et éviter de changer de posture. Les duretés, raideurs, engourdissements, etc. devront être notés.

Un effort vigoureux (ātāpa) doit être consenti pour noter les mouvements de l’abdomen. Nous y parvenons le temps de quelques respirations et puis toutes sortes de pensées, imaginations, projets liés à des objets attirants vont apparaître, et nous nous y complairons. C’est la joie enracinée dans les plaisirs sensuels (sāmisa sukha). Nous verrons de belles images, penserons à la famille, à nos possessions, à nos connaissances et serons heureux. L’esprit retourne volontiers dans sa maison : le monde des expériences sensorielles. L’homme ordinaire (puthujjana) aime voir, entendre, sentir, goûter, toucher et penser. Si ces plaisirs se manifestent, il faut les noter.

Quand le yogi ne cherche pas ces plaisirs sensuels, est calme et peut observer sans interruption les mouvements de dilatation et de contraction de l’abdomen, les phases du mouvement des pieds ainsi que tous les autres objets aux six portes des sens, une confiance enracinée dans l’expérience, une satisfaction et une joie non sensuelle (nirāmisa sukha) vont surgir. Il se sentira en accord avec l’enseignement du Buddha. Aucun désir ni aucune colère ne sont présents quand il note chaque vision, audition, etc. au moment où elle se produit, il peut voir l’apparition et la disparition de tous les phénomènes, la douleur disparaît à un endroit et réapparaît à un autre. Il comprend que ce corps sujet à l’impermanence, la souffrance et le non-soi n’est pas désirable. Ces trois caractéristiques sont très difficiles à réaliser et accepter. Du temps du Buddha deux femmes refusaient d’écouter ses sermons car il en était tout le temps question, mais si nous les voyons, nous aurons le désir de nous libérer du saṃsāra, d’échapper à la naissance, la vieillesse, la maladie et la mort.

Quand nous ne parvenons pas à noter, le découragement, des pensées en tout genre et des imaginations vont nous envahir. Les yogis rapportent parfois à l’entretien des pensées inquiètes ou tristes, la perte d’un travail ou le souci pour les proches. Il faut noter ces douleurs liées aux sens (sāmisa dukkha).

Parfois, la déception ou d’autres formes de douleurs non sensuelles (nirāmisa dukkha) se manifestent quand nous ne parvenons pas à fixer l’esprit à l’objet. Si nous notons cette colère, elle pourrait s’intensifier ou se diriger contre quelqu’un. Si nous la notons bien, elle pourrait diminuer. Le Buddha distingue citta (l’esprit qui note) et cetasika (la colère, tristesse, etc.)

Si nous pensons à des malheurs advenus à des gens que nous ne connaissons pas, c’est une forme de ressenti neutre sensuel (sāmisa upekkhā) qu’il faut noter.

Si le yogi parvient à noter tout ce qui se manifeste dans le corps et l’esprit y compris des choses très subtiles, une excitation, une joie, voire des lumières vont se manifester les premières fois. Mais à terme, il s’y habituera et ces phénomènes n’éveilleront plus que des ressentis neutres non sensuels (nirāmisa upekkhā).

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