Samatha et vipassanā

Certains professeurs mettent l’accent sur samatha, d’autres sur vipassanā. Dans les textes du theravāda, on parle de kammaṭṭhāna (kamma = travail ou action et ṭṭhāna = endroit — soit lieu de travail ou atelier) et de bhāvanā (développement). Samatha bhāvanā développe le calme. Mais cette pratique n’est pas spécifique au bouddhisme. Le Buddha a suivi l’enseignement de professeurs très connus de l’époque, atteint les différents stades enseignés dans ces techniques avant de réaliser qu’ils ne représentaient pas le but final, même s’il reconnaissait leur utilité. Il parle pour cette raison ici et là de ces techniques dans son enseignement, mais c’est surtout Buddhaghosa qui les explique en détail au 5ème siècle et les intègre ainsi dans la voie bouddhiste.

Dans certaines techniques, samatha est d’abord développé deux ou trois jours avant de passer à vipassanā, mais selon Mahasi, ce n’est pas nécessaire. Samatha peut toutefois constituer un très bon fondement pour vipassanā car seul un esprit concentré peut voir la réalité (samāhito yathābhūtaṃ pajānāti). Parmi les 40 sujets de méditation détaillés dans le Visuddhimagga, il faut seulement choisir celui qui convient à son tempérament. Il y a trois niveaux de concentration: ❶ parikamma (préliminaire — un signe (nimitta) apparaît, lumières, expansion ou rétrécissement de l’objet, formes,…) ; ❷ upacāra (accès — le signe (paṭibhāganimitta) devient prédominant et l’objet primaire semble disparaître. La méditation de ce méditant est tantôt profonde, tantôt superficielle, selon qu’il parvient à éliminer les 5 empêchements) ; ❸ appana (signe très fort – le méditant a atteint le jhāna et peut le développer à volonté. Les facteurs jhaniques sont développés. Il y a quatre jhāna ou absorptions de plus en plus profondes, dont la dernière se caractérise par l’équanimité)

De nos jours, vipassanā est beaucoup plus populaire. Les jhāna purifient temporairement l’esprit mais les impuretés reviennent ensuite. Vipassanā, c’est voir les choses telles qu’elles sont réellement, c’est-à-dire les trois caractéristiques des phénomènes, impermanents, douloureux et n’appartenant à personne. Vipassanā à proprement parler ne démarre qu’au stade d’uddayabbaya, mais la pratique qui précède, voir les choses telles qu’elles sont, est très utile déjà. La conscience de l’objet, l’inspir, l’expir ou un son par exemple, est aussi impermanente et disparaît avec l’objet. Sans objet, il ne peut y avoir de conscience et celle-ci n’apparait qu’une seule fois en un endroit spécifique. Elle ne va nulle part.

Le satipaṭṭhānasutta est un discours très important où le Buddha explique la méditation en détail. Il expose quatre établissements de l’attention (corps, ressentis, activités mentales, dhamma). Observer les ressentis des pieds à la tête et de la tête aux pieds est une bonne pratique mais n’est pas encore la vision de l’impermanence. Il n’est pas facile de voir l’esprit, mais un esprit habité par la colère ou l’avidité est plus facile à voir, comme l’eau qui devient plus perceptible lorsqu’elle est colorée. Voir l’impermanence des quatre satipaṭṭhāna est le but principal de vipassanā. Cela permet de voir la souffrance, la cause de la souffrance, ainsi que le chemin pour se libérer.

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